WU-TANG – THE SAGA CONTINUES [CHRONIQUE]

Non il ne s’agit pas d’un album officiel du Wu-Tang Clan mais sur le papier et dans ton casque, c’est ce qui s’en rapproche le plus depuis pas mal d’années.
Excepté U-God (en procès avec RZA pour des royalties non versés), tous les samouraïs sont là, certains plus assidus que d’autres, certes, mais ne boudons pas notre plaisir !

On ne va pas revenir sur les derniers albums mitigés du Wu mais A Better Tomorrow était complètement raté et franchement ça fait longtemps qu’on n’espérait plus un projet consistant du crew de Staten Island.
J’utilise volontairement le terme crew et pas groupe car j’ai toujours trouvé que le Wu-Tang brillait plus par ses individualités qu’en équipe, la majorité des classiques du Wu sont d’ailleurs les albums solo de ses membres, en groupe il n’y en a que 2, pas besoin de les citer.
Les égos de ces « super MCs » ont clairement pris le pas sur la cohésion de groupe et malgré le talent certain, on n’est jamais vraiment retourné dans les traumatisantes 36 Chambres.
RZA n’est évidemment pas non plus innocent à ce lent naufrage, la direction sonore qu’il tente de donner (un peu de force) depuis pas mal d’années n’a jamais convaincu ni les autres MCs, ni les fans, ni les critiques, c’est donc finalement avec soulagement que l’on retrouve DJ Mathematics à la production de cette compilation/album.

Responsable de la création du fameux logo W et DJ historique du groupe, Mathematics est garant du son signature du Wu, pas de révolution musicale mais on est enfin en territoire connu, nous comme les rappeurs, tout le monde joue enfin à son poste et retrouve avec plaisir et nostalgie les dialogues de films de kung-fu, les pianos dissonants, les samples découpés au katana et les drums crades de New-York.

Method Man, qui peine à nous sortir un album, est celui qui porte le projet, il est le seul à avoir deux solo dont l’uppercut Hood Go Bang! qui aurait mérité un second couplet.
Malgré un flow quelque peu émoussé, Meth enchaîne les rimes mémorables comme sur l’excellent Pearl Harbor avec le regretté Sean Price :

“Till I finish my dessert, nobody eating
That’s everybody, I mean anybody
I might leave somebody bleeding
Or watch me catch a homi, even hit you in the lobby
Shotty pop ya like a molly, probably leave ya hardly breathing
Don’t try to Blaze with Johnny even if you got an army
Dirty money in the laundry, don’t ask why, I got my reasons
I puff that Bob Marley, might hit you with the Tommy
You can catch me in the party near the speaker not speaking”

Redman est également très présent et apporte l’énergie dont les flows fatigués de ses camarades manquent parfois, avec en point d’orgue les deux singles incisifs de l’album : Lesson Learn’d et People Say, deux des meilleurs sons du Wu de ces dernières années.

On ne ressent pas du tout qu’il s’agit d’une compilation, l’album est musicalement cohérent et solide du début à la fin avec des intros et transitions travaillées propres à l’univers du Wu, rien d’incroyable certes,  mais on n’avait plus l’habitude !
Quasiment aucun mauvais morceaux sur l’album non plus, on regrettera peut-être quelques refrains douteux comme sur le solo de RZA, le mitigé G’d Up ou My Only One, la discrétion de Ghostface et Rae qui sont habituellement deux piliers du groupe, l’absence de U-God ou encore le passage en coup de vent de GZA sur le posse cut « If What You Say Is True » :

“A rhyme is a struggle from conception
Series of complex maps in all directions
Totally dependent on an act of breathing
Learning, depending on an act of reading
The MC draws in a long deep breath
Holding it until making it right before it left
Extracted from it is life-giving properties
Reacting from it and control the properly”

Alors certes, rien de très nouveau sur cette galette, certains diront que Mathematics fait du sous RZA de la grande époque sans le génie, d’autres regretteront que GZA n’ait qu’un petit couplet, que Rae et Ghost ne soient pas plus présents ou que Met & Red n’aient pas la fougue de leur jeunes années…
Difficile de vous contredire mais difficile aussi de ne pas céder à cette nostalgie si tentante qui va forcément nous faire bouger la tête et froncer les sourcils.

Personnellement je ne veux pas sur-analyser ce projet, je n’avais pas autant kiffé un album du Wu depuis Wu-Tang Forever, je n’y croyais plus et c’est donc juste un réel plaisir de réentendre encore une petite fois de tels talents sur le son qu’ils ont créé.

Pour les fans du Wu, on a du lourd sur le shop, on a les vinyles de 36 Chambers, Wu-Tang Forever, Cuban Linx, Liquid Swords, Ironman, Tical, Blackout! et Return to the 36 Chambers, les mecs ont beaucoup trop de classiques, fais-toi plaisir !