RÉVISE TES CLASSIQUES #5 - MOBB DEEP / SHOOK ONES PT. II

MOBB DEEP – THE INFAMOUS [CHRONIQUE]

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Les vinyle de The Infamous est à chopper sur le shop ici.

The InfamousNote

CLASSIC SHIT !!

« Son, they shook…
Cause ain’t no such things as halfway crooks
Scared to death, scared to look
They shook
Cause ain’t no such things as halfway crooks
Scared to death, scared to look »

BEST TRACKS : The Start Of Your Ending, Survival Of The Fittest, Eye For An Eye, Q.U.–Hectic, Right Back At You, Shook Ones Pt. II TOP TRACK
Shook Ones Pt. II

Comme vous avez pu le constater, je voue un amour incommensurable au rap new-yorkais, dès lors, comment ne pas chroniquer LA bande son de Queens Bridge, je parle bien sûr de The Infamous de Mobb Deep.

Si vous ne connaissez pas encore ce duo mythique, je pense qu’un sample de Premo résume assez bien l’univers du groupe :
« I’m from the place where harcore is beautiful ».
Pas d’artifices, pas de maquillage, pas d’effets spéciaux, non, c’est une plongée brutale et sans concession dans les profondeurs de QB dans toute sa puanteur, sa violence et sa dépravation.
Pas de détour, la musique de Prodigy et Havoc est aussi directe et précise qu’une balle dans la tête.

Si le premier essai du duo new-yorkais, Juvenile Hell, passa inaperçu, c’est déjà armé d’une faux que le jeune Havoc venait répandre la mort.
Loin d’être un échec critique, il permit à Mobb Deep d’évoluer et de trouver sa véritable identité. En effet, peu satisfait des productions reçues pour ce second projet, Havoc décida d’apprendre les techniques de beatmaking, ce petit détail pris ensuite une importance prépondérante puisqu’il permit au groupe de créer un univers musical unique, repris et copié à foison par la suite.

Tel un peintre réaliste, Havoc réussit à retranscrire la froideur du monde dans lequel ils survivent, la vision néfaste des bas-fonds new-yorkais venait de trouver son écho musical.
Une noirceur riche de son minimalisme qui se retrouve dans des textures sonores lentes et épurées parsemées de boucles dépouillées et hypnotiques.
Plus que l’utilisation fréquente de samples de pianos et violons parfois issus du classique, c’est cet écho omniprésent et cette résonance si caractéristique du groupe, comme s’il enregistrait dans une cave, qui donnent un relief unique et une froideur abyssale aux beats d’Havoc – particularité encore plus saisissante à l’écoute au casque –.

ProdigySi la musique pouvait avoir une odeur, The Infamous sentirait la poudre à canon, si elle pouvait avoir une couleur, ça serait rouge sang, le pessimisme désespérant de ce second opus, beaucoup plus mature et maîtrisé, va vous torturer sans répit du début à la fin avant de vous asséner deux coups fatals.
La tension est ubiquiste, tant dans les craquements de vinyle rappelant des brûlures de cigarette que dans la saisissante complémentarité du duo, dans les propos comme dans les voix, quasi-indissociables. Seul le timbre légèrement plus éraillé de P lui permet de retranscrire la souffrance avec encore plus de véracité.

Si cette symbiose avec les beats crée un parfait mélange, c’est sans surjouer que Prodigy et Havoc posent sur ces instrumentaux lugubres, en effet, à l’inverse de certains membres du Wu-Tang, les flows de nos compères, tendus et agressifs, restent sobres, posés et jamais off-beat, reflétant ainsi la peur et l’atmosphère morbide des ghettos new-yorkais avec une authenticité rarement égalée.

The Start Of Your Ending, vous êtes prévenus, dès la première piste du disque, c’est la mort qui vous attend au tournant !
Tel un frisson qui traverse votre corps, cette boucle de piano vaporeuse passe d’un écouteur à l’autre et vous accule comme un agneau au milieu d’une meute de loups affamés.
Pas le temps de respirer, pas le temps de le voir venir, premier coup de poignard : rythmique sèche, craquements de vinyle, deux notes de piano funestes, les battements de votre cœur, « There’s a war goin’ on outside, no man is safe from », une des phrases les plus samplées du game, pour un des plus grands classiques du rap, Survival Of The Fittest.
Rongés par la violence, P et Havoc semblent plus torturés que jamais, comme si la faucheuse les attendait à chaque coin de rue « You could run but you can’t hide forever » et que leur quotidien n’était que peur et souffrance.

Drogue, guerre des gangs, règlements de compte, meurtres, la brutalité de QB n’a d’égale que la musique de Mobb Deep, elle vous prend aux tripes et ne vous lâche plus jusqu’à la mort.
Œil pour œil, dent pour dent, c’est la seule loi qui règne dans ces quartiers, Eye For An Eye (Your Beef Is Mines), Nas et Raekwon viennent ce fondre dans ce décor morbide soutenu par un beat terrifiant pour un quatuor létal.
Seul Q-Tip parvient à éclairer quelque peu l’album à plusieurs reprises, plus impliqué dans le projet qu’on ne le pense, il est fan du duo et a pas mal contribué au succès de cet album, que ce soit en donnant des conseils studio à Havoc ou en prenant en charge trois productions. Sa touche jazzy typique du mouvement Native Tongues est aussi bien présente dans Give Up The Goods qui invite Big Noyd que dans Temperature’s Rising qui nous offre un excellent refrain soul en compagnie de Crystal Johnson qui assure d’ailleurs la seule partie chantée de cette jungle de bitume.

HavocLes bombes s’enchaînent sans faiblir, difficile de zapper une track tant l’homogénéité du disque vous oppresse; quand Up North Trip semble pointer vers la lumière, Q.U.–Hectic vous ramène à la réalité, une ligne de synthé hostile tournoie et vous suit comme votre ombre, quelques bruitages inquiétants rappelant des claquements de dents sont déchirés par un saxophone spectral semblant venir tout droit des enfers…
Une de mes tracks favorites du groupe, tout comme la suivante, Right Back At You, des percussions surpuissantes amplifiées par une basse omniprésente et quelques coups de guitare lancinants viennent chercher deux soldats du Wu, Raekwon et Ghostface, ainsi que l’inusable Big Noyd pour une attaque frontale accentuée par un refrain aussi addictif qu’une ligne de coke :
« I put the drop on you kid, now I got you
You got the heart to get busy without your crew
Let’s get it on nigga, do what we gotta do
You buckin me I’m buckin right back at you »

From the Cradle To The Grave, c’est le destin de la plupart de ceux qui naissent à Queens Bridge, un cercle vicieux qui semble aussi incurable qu’un virus mortel; contaminé par cette atmosphère âcre et malsaine, même Q-Tip se la joue gangsta sur Drink Away The Pain, pas dans l’instru qui sample un saxophone jazzy mais bien dans son couplet.
L’avenir funeste se dessine, la fin est inexorable, si le premier coup de poignard ne vous a pas achevé, Shook Ones Pt. II s’en chargera… Un son MYTHIQUE, le plus grand morceau de rap jamais composé pour certains, plus que de la musique, c’est le ghetto qui prend le micro :
« Son, they shook
Cause ain’t no such things as halfway crooks
Scared to death, scared to look »
À 19 ans seulement, Prodigy et Havoc semblent plus proches de la mort que de la vie :
« I’m only nineteen but my mind is old
And when the things get for real my warm heart turns cold »

Et un piano d’outre tombe résonne comme si vous assistiez à la votre, the Party’s Over, de l’enfer de Queensbridge vous rejoignez les enfers, ou peut-être que la mort est une délivrance et que le véritable enfer était ici, sous vos yeux…

P.S. : C’est sûrement l’un des albums rap que j’ai le plus saigné, et si comme moi, The Infamous vous a laissé une cicatrice indélébile, je ne saurais trop vous conseiller trois albums :
– Le troisième Mobb Deep, Hell On Earth, un classique du même niveau que The Infamous avec Survival of The Fittest et Shook Ones Pt. II en moins !
– Episodes Of A Hustla de Big Noyd, intégralement produit par Havoc, sans atteindre le génie des deux classiques de Mobb Deep, on retrouve cette ambiance unique grâce aux beats et à la présence au mic de P et Havoc.
– The War Report, le classique de Capone-N-Noreaga, un duo très proche de Mobb Deep avec d’ailleurs quelques prods d’Havoc.
Profitez-en aussi pour écouter la nouvelle playlist, « The Infamous ».

 

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